Jacques Doucet-Yves Saint Laurent,le goût en héritage

Salon du studio Saint-James chez J.Doucet, Grand salon 55 rue de Babylone. Vues de l'exposition Jacques Doucet-Yves Saint Laurent Vivre pour l'art @Fondation Pierre Bergé YSL.

Jérôme Neutres dans un décor spécialement pensé pour la Fondation Pierre Bergé -Yves Saint Laurent imagine un dialogue entre des chefs d'oeuvre de deux collectionneurs et couturiers d'exception, Jacques Doucet et son disciple Yves Saint Laurent. On est à la fois rue Saint-James à Neuilly en 1928 chez "Monsieur Jacques" comme l'appelle ses clientes de la Belle Epoque et rue de Babylone dans l'appartement d'Yves Saint Laurent et Pierre Bergé, cinquante ans plus tard. Deux intérieurs voués à l'art vivant où cohabitent dans la tradition des cabinets de curiosité (ou studiolo italien de la Renaissance) des objets singuliers, luxueux et raffinés. Jacques Doucet qui souffrait d'un manque de reconnaissance de l'élite parisienne est d'abord et avant tout un collectionneur visionnaire qui n'hésite pas à vendre la totalité de sa première collection classique (pour 15 millions de francs or) pour se tourner vers les créateurs de son temps : Braque, Picasso et Brancusi en tête mais aussi des objets primitifs, des manuscrits et livres rares et des designers encore peu connus (Eileen Gray ou Pierre Legrain) formant un ensemble/installation représentatif de l'éclectisme de l'art Déco, dont il est l'un des premiers ambassadeurs.

Yves Saint Laurent autre apôtre avec Pierre Bergé du mélange des genres a toujours été fasciné par le flair de son ainé, cherchant à recréer des parcelles de cet espace collection, comme cette paire de banquettes signée Gustave Miklos ainsi qu'un tabouret d'inspiration africaine de Legrain acquis dans la vente fleuve Doucet. Plus tard la toile "Il Ritornante" de Giorgio de Chirico que Doucet avait découverte chez Paul Guillaume par l'entremise d'André Breton viendra rejoindre la rue de Babylone. Ainsi des traits d'union peuvent être tissés entre les démarches même si chacune reste unique et insaisissable parfois. Grâce aux photographies d'époque de la rue Saint James il est possible de se replonger dans cette atmosphère qui confirme la vision d'un curateur, Jacques Doucet confrontant Les Demoiselles d'Avignon de Picasso à la Charmeuse de serpents du Douanier Rousseau à un guéridon de Rose Adler ou un sofa de Marcel Coard, tandis qu'Yves Saint Laurent et Pierre Bergé rapprochent un Goya d'un masque oiseau Sénoufo, Warhol ou Mondrian. Un grand écart comme seuls savent le faire les génies !

La scénographie tout en miroir et hybridation signée Nathalie Crinière dans un décor de Jacques Grange est le support idéal pour ce culte du beau.

Infos pratiques :

Jacques Doucet-Yves Saint Laurent

Vivre pour l'art

jusqu'au 14 février 2016

Fondation Pierre Bergé Yves Saint Laurent