Rembrandt ©Musée du Louvre, Musée des Beaux Arts de Tours, Staatliche Museum zu Berlin,Musée Jacquemart-André,Musée de l'Ermitage, Kunsthistorisches Museum Vienna,Nationalmuseum Stockholm.
Au delà de l'image officielle, quel est le vrai visage de Rembrandt ? comment ses proches et les aléas de sa vie influencent-ils son œuvre ? autant de questions qui jalonnent la remarquable exposition proposée par le musée Jacquemart-André dont les fondateurs étaient de fervents admirateurs du maître avec pas moins de 3 chefs d'œuvre dans leur collection. Ce "Rembrandt intime" je l'avais côtoyé cet été à travers la vidéo de l'artiste néerlandaise Fiona Tan sur le destin de sa fille illégitime Cornelia, fruit de sa liaison avec sa servante Hendrickje Stoffels, comme cela est rappelé dans la chronologie. Une incursion actuelle qui nous met sur la voie d'un artiste à la vie personnelle assez tumultueuse. En effet à la mort précoce de son épouse Saskia, Geertje, veuve d'un militaire le prend sous son aile avant d'être remplacée par Hendrickje sa jeune servante et concubine. Elle lui intentera d'ailleurs un procès. De plus une mauvaise gestion de ses biens conduira Rembrandt à vendre sa maison et l'ensemble de ses collections pour finalement dépendre de son fils et mourir dans une totale déchéance . Ainsi c'est bien l'homme que nous rencontrons, derrière sa gloire et son triomphe, comme cela est suggéré dans l'exceptionnel autoportrait de la 1ère salle du musée du Louvre. Son regard pénétrant et légèrement interrogateur qui nous fixe de trois quart et cette chevelure désordonnée détonnent avec la riche chaine en or et l'habit noir austère. L'artiste reste sans concession pour lui-même et ses modèles, de riches commanditaires de la société hollandaise, comme c'est le cas avec la princesse Amalia van Solms ou cette autre femme d'un opulent brasseur, Haesje van Cleyburg, pas spécialement gracieuses.
Réaliste et fin psychologue il se distingue aussi par une grande maîtrise de la lumière qui éclate avec cette spectaculaire confrontation entre les Pèlerins d'Emmaüs des Jacquemart André et la version du Louvre. S'ouvre alors la période faste où il dirige à Amsterdam l'atelier du marchand d'art Hendrick Uylenburg avec l'apparition de figures allégoriques et fantasmagoriques (héroïne de l'Ancien Testament d'Ottawa, Saskia en déesse Flore de St Pétersbourg et sublime homme en costume oriental de New York). Le dessin et la gravure tiennent une grande place également dans sa maturité stylistique comme on le voit avec ces esquisses préparatoires ou les déclinaisons de certains sujets bibliques (Ecce Homo de Londres).
C'est dans les années 1650 qu'il refuse les commandes pour se dédier entièrement à la représentation de ses proches, comme avec ces 2 chefs d'œuvre de la fin du parcours : la Jeune fille à sa fenêtre (Stockholm) et son fils Titus (Vienne). Il va à la quête de l'émotion pure en ne gardant que l'essentiel.
Cette vingtaine de tableaux et trentaine d'œuvres gravées des plus grandes institutions mondiales agissent de concert dans cet écrin de l'hôtel particulier des Jacquemart-André pour donner à voir
la face cachée de ce virtuose du clair obscur. A ne manquer sous aucun prétexte !
Infos pratiques :
Rembrandt intime
jusqu'au 23 janvier 2016
Musée Jacquemart-André