©Nicolas Darrot, Eugen Gabritschevsky, Boris Chouvellon.
Retour à l'art brut et aux univers mutants à la Maison Rouge avec le russe Eugen Gabritschevsky (1893-1979) et le français Nicolas Darrot (né en 1972) dont les mondes alternatifs sont mis en parallèle.
Le premier issu de la grande bourgeoisie moscovite se destine à la biologie et se passionne pour l'hérédité quand atteint de lourds troubles psychiques, il se voit interné pendant 50 ans jusqu'à sort. C'est alors qu'il explore une période créative très prolifique où la science et l'art le disputent autour des mutations des espèces à l'aide d'un crayon ou d'un pinceau. Une lecture du monde où l'aléatoire et l'hybride le partagent avec une fascination pour la nature et je dois reconnaître que n'ayant pas une passion pour les artistes brut j'ai été plutôt convaincue par cette liberté du geste et expérimentations multiples.
Nicolas Darrot qui opère un retour à la Maison Rouge après son "Passage au Noir" pour le patio en 2006, part de la science et de la technique pour décrire les dérives mortifères de notre société à travers des machineries sophistiquées autour du règne animal. Marionnettes ou robots sous l'emprise de puissances malveillantes subissent les pires châtiments et il faut retenir son souffle dans cette lente descente aux enfers. Accueillis par un yeti et deux acolytes se livrant à une curieuse chorégraphie nous découvrons d'étranges spécimens épinglés et greffés de prothèses futuristes avant de lever le rideau sur ce qui ressemble à un veau d'or biblique sous d'épaisses volutes de vapeur, tandis qu'au sous-sol les instincts les plus abjects menacent l'ordre du monde. Pulsions déviantes qui court-circuitent nos attentes, ode à l'irrationnel et à l'obscur, ces petites performances qui renvoient à l'Enfer de Jérôme Bosch ou de Dante déclenchent des sons qui rajoutent à la sensation de chaos imminent. Entre rêve et cauchemar l'on ressort ébranlés et fascinés par cette collision quasi cinématographique. Un Deus ex Machina qui navigue avec brio entre la science fiction, la culture manga, le spiritisme, la mythologie pour nous offrir des rituels aussi effrayants que stimulants.
Eugen Gabritschevsky est représenté par la galerie Christian Berst
Nicolas Darrot est représenté par la galerie Eva Hober.
Ne manquez pas en résonance l'étrange mobile de Boris Chouvellon "Modern Express" réalisé pour le Patio.
Infos pratiques :
Eugen Gabritschevsky
et
Nicolas Darrot
jusqu'au 18 septembre 2016
La Maison/ fondation Antoine de Galbert