Christophe Leribault Crédit : Pierre Antoine. Charles-Édouard Leprince (baron de Crespy), Promenade de Julie et Saint-Preux sur le lac de Genève, 1824, huile sur toile, Montmorency, musée Jean-Jacques Rousseau Photo Didier Fontan.Pendule de Notre-Dame, 1835-1845 Paris, musée Carnavalet @Paris Musées / Pierre Antoine.Désiré Court, Femme à mi-corps, couchée sur un divan, 1829, huile sur toile, Montpellier, musée Fabre Photo Musée Fabre, Montpellier/Frédéric Jaulmes.Eugène Lami, Scène de carnaval, place de la Concorde, 1834, huile sur toile. Paris, musée Carnavalet - Histoire de Paris Photo Musée Carnavalet / Roger-Viollet.Caspar David Friedrich, Paysage de montagne avec croix au milieu des sapins, vers 1804-1805, Plume et encre, lavis brun sur crayon graphite sur vélin © Klassik Stiftung Weimar.Johann Heinrich Füssli, Scène d’incantation avec une sorcière près de l’autel, avril 1779, Crayon graphite, plume et encre brune et noire, lavis gris sur papier © Klassik Stiftung Weimar.
Nous le rencontrons à l'occasion de l'ouverture des expositions Paris
Romantique (Petit Palais et musée de la Vie romantique) et L'Allemagne Romantique, dessins des musées de Weimar (Petit Palais).
1. Reconduit pour 3 ans avec un bilan plus que réussi (boom de la
fréquentation), quelle est selon vous la clé de ce succès ?
Le Petit Palais qui se distingue par ses collections de peintures, sculptures et objets d’art de l’Antiquité au début du XXème siècle, avait une programmation d'expositions pluridisciplinaires couvrant toutes les civilisations qui manquait un peu d’identité au moment où des musées spécialisés très dynamiques comme le musée Guimet ou le Quai Branly avaient pris leur place dans le paysage parisien. À mon arrivée il y a 7 ans, il m’a semblé nécessaire de recentrer la programmation sur les périodes les plus riches des collections, du
XVIIème siècle aux années 1900 - sans pour autant se tourner exclusivement vers les artistes dont nous avons les œuvres. Mieux mettre en valeur nos collections permanentes est un autre axe fort, d'autant qu'il fait la différence avec notre voisin le Grand Palais, toujours très dynamique mais qui en est
dépourvu. Il me semble que cette démarche est à présent bien comprise du public qui est toujours plus nombreux dans nos expositions et s'avère prêt à la découverte d'artistes moins connus tels Anders Zorn ou Carl Larsson, côté Nordiques, ou, parmi les gloires oubliées de la peinture française 1900, Albert
Besnard ou George Desvallières. Nous poursuivons dans cette voie à la rentrée, avec le sculpteur napolitain fin-de-Siècle Vincenzo Gemito et le grand peintre baroque Luca Giordano. Ce dernier est plus connu des amateurs mais ce sera néanmoins sa première rétrospective française. Ces monographies alternent avec des sujets thématiques, comme le Baroque des Lumières, consacrée à la peinture religieuse du XVIIIème siècle ou Les Hollandais à Paris au XIXe. C’est passionnant de pouvoir proposer ainsi une programmation alternative, et stimulant de constater que les visiteurs sont demandeurs de telles réhabilitations.
2. Double accent autour du romantisme, français et allemand : genèse et scénographie
Pour traiter de périodes moins à la mode et d’artistes moins connus à
l’exception ici de Géricault ou de Delacroix, il était important de mettre les œuvres en situation grâce à une scénographie soignée et de réfléchir attentivement à l'organisation du propos.
Pour évoquer Paris à l’époque romantique, nous voulions présenter aussi bien les arts décoratifs que la musique, l’opéra, le théâtre, la danse... au-delà de la peinture et de la sculpture, mais il fallait éviter de juxtaposer des chapitres trop scolaires. L'idée est venue de proposer plutôt une balade dans Paris, du matin à la fin de soirée, autour de ses quartiers emblématiques, du luxe à la vie de bohème, des salons mondains au Boulevard du Crime, avec une place spéciale accordée à Notre Dame que Victor Hugo avait remis par son roman au cœur de la cité. Chaque salle a son sujet et son style et coordonne ainsi le flot des 600 œuvres dont l'accumulation serait sinon déroutante tant il a de passerelles entre les arts à une époque où les musiciens, poètes, artistes et critiques se côtoyaient dans les salons du quartier de la Nouvelle Athènes et ailleurs.
Présenter de l’art contemporain dans des musées classiques n’a rien
d’original. Le Petit Palais dont les collections se terminent à la Première guerre mondiale, ne doit certes pas trop empiéter sur le domaine du musée d’Art moderne de la Ville de Paris qui a été justement créé après-guerre à partir des collections XXe du Petit Palais qui y ont été transférées.
Notre association annuelle avec la Fiac nous a toutefois permis de renouer un lien direct avec le Grand Palais. En soutenant ce grand rendez-vous de l’art contemporain, nous avons aussi retrouvé l’esplanade piétonne, l’actuelle avenue Winston Churchill barrée pour l’occasion, dans sa vocation d’origine au moment de l’exposition universelle de 1900 qui unissait les deux palais.
Avec plusieurs collègues et un commissaire invité, nous sélectionnons les œuvres destinées aussi bien à l’extérieur qu’à la galerie sud du musée et au jardin. Il ne s’agit pas de stands de la FIAC, mais d’une sélection assumée de pièces souvent de grandes tailles, présentés aux côtés de nos collections dans des espaces d’accès gratuites, avec et j’y tiens beaucoup, de jeunes médiateurs de l’École du Louvre qui offrent un support à des visiteurs pas forcément sensibles à l’art contemporain.
Autre trait contemporain : Le nouveau restaurant, le Jardin du Petit Palais
Il y a avait déjà un restaurant au musée, bien pratique dans ce quartier de grandes tables très fermées, mais nous avons souhaité en rénover le décor et fait évoluer la formule avec d’une part, une carte plus raffinée, signée de la cheffe Amandine Chaignot, à la mezzanine, et, en bas, une offre plus accessible et rapide. C’est important de permettre ainsi une pause dans la visite au milieu de cet oasis de verdure.
Paris musées, l’établissement public qui regroupe les 14 musées municipaux, ne nous donne pas des objectifs chiffrés insurmontables. Sa priorité est davantage la qualité de l’accueil et que nous nous adressions à tous les types de publics, grâce notamment à des pédagogies innovantes. L’année dernière nous avons affiché une fréquentation record de 1,2 millions de visiteurs, supérieure à celle du Grand Palais. Mais nous ne nous inscrivons pas dans une course quotidienne avec notre voisin, et je ne tiens pas à voir affluer une
foule compacte qui rendrait la visite impossible et découragerait les Parisiens de venir.
J’ai donc eu de nombreuses bonnes fées qui ont conforté mon enthousiasme de départ et m’ont convaincu qu’il fallait à mon tour faire partager au public les redécouvertes de l’histoire de l’art. C’est notre rôle de passeur dans les musées où il faut déployer à la fois de l’érudition et de la pédagogie, savoir être à l’écoute du public sans renoncer à assumer des partis-pris.